Evolution et diffusion de la gypserie en France (du XVIIe au XIXe. Siècle.), le rôle du compagnonnage des plâtriers
JoëI PUISAIS, compagnon du devoir
Historique. Exemples choisis à partir de sources d’archives et d’ouvrages réalisés en gypseries.

Le plâtre à travers la réglementation provençale XIVe -XVlIle siècle
Philippe BERNARDI, CNRS - LAMM

L’attestation de l’ancienneté de l’utilisation du plâtre en un lieu constitue certes un jalon important dans notre connaissance de ce matériau. La mention isolée ou l’attestation ponctuelle revêtent cependant un caractère anecdotique qu’il convient de pouvoir dépasser pour apprécier la part prise par ce matériau méconnu dans l’histoire de la construction. Ainsi ne peut-on se contenter de constater, à partir de quelques mentions médiévales de gipum ou de giperius, un usage ancien du plâtre en Provence sans chercher à apprécier la fréquence de cet emploi. Le problème se pose alors des moyens dont nous disposons pour appréhender la place tenue par un matériau, moins pérenne que la pierre de taille, qui n’a laissé que peu de traces dans le bâti ancien conservé. L’étude systématique des contrats de construction peut être un moyen d’aborder cette question. La présente contribution se propose d’en évoquer un autre à travers l’étude des traces laissées dans la législation médiévale et moderne de la basse Provence occidentale par les prescriptions relatives au plâtre.
Le corpus de textes réunis couvre une période allant du milieu du XIVe siècle à la fin du XVllle siècle. Il atteste en lui-même de la permanence et de l’importance de l’usage de ce matériau dans notre région. L’analyse de ces documents permettra de présenter quelques données sur le mode de fabrication et de commercialisation du gip.
Je me propose ainsi, à partir de ces sources et des indications plus éparses que peuvent fournir les actes notariés médiévaux, d’envisager successivement les quatre étapes de transformation du gypse en plâtre extraction, cuisson, broyage et tamisage. Des différents types de carrières attestés par les sources écrites au « forges à plâtre »installées dans les faubourgs d’Aix-en-Provence au XVe siècle ou au moulin à plâtre de Saint Antonin sur -Bayon attesté en 1501, en passant par les différents modes de cuisson (au bois, au charbon de pierre) et les malfaçons poursuivies, ce sont ainsi les diverses qualités de plâtre disponibles qui seront évoquées.
Matériau multiple, objet de fraudes, le plâtre « est une marchandise dont on ne peut se passer dans ce pays ». C’est ce qu’affirme un mémoire rédigé en 1785 et c’est ce que confirme la surveillance constante et tatillonne dont il fut l’objet depuis le XlVe siècle au moins.

 
Les hommes de la gypserie en midi toulousain au XVll et XVIII siècle
Fabienne FOR TIER, étudiante en DEA d’histoire de l’art

Aux XVIIe et XVllle siècles, dans le Midi toulousain, le plâtre fut utilisé simultanément par des gipiers, des sculpteurs ~t des plâtriers, pour l’architecture et la décoration intérieure des édifices civils et religieux. Employé comme matériau de sculpture dès le XVle siècle -période pour laquelle les preuves de son maniement sont rares- sa manipulation se fit de plus en plus fréquente à partir de la deuxième moitié du XVlle siècle. Au XVllle siècle, le changement de conception de l’aménagement intérieur des demeures entraîna la sollicitation régulière d’artisans spécialisés, aptes àrépondre aux besoins particuliers des maîtres d’ouvrages.
Il y eut de plus en plus de plâtriers, si bien qu’ils s’unirent en un corps de métier indépendant, des maçons, tailleurs de pierre et tuiliers auxquels ils étaient liés auparavant.
Nous essaierons de mieux appréhender l’activité des artisans du plâtre au cours de ces deux siècles par l’évocation des contrats de commande d’oeuvres, des contrats d’apprentissage et des documents relatifs à la corporation des plâtriers retrouvés dans les archives.
Il sera d’ailleurs intéressant de comparer le fonctionnement du métier à Toulouse, avec ceux d’autres villes du sud de la France telles que Montpellier ou Aix-en-Provence.
Les questions auxquelles nous tenterons de répondre sont les suivantes:
- Quelle était la formation reçue par ces artisans?
- Existait-il des dynasties d’artisans du métier?
- Quels étaient les artisans auxquels faisaient appel le plus souvent les commanditaires (sculpteurs, gipiers ou plâtriers)?
- Quelles étaient les figures incontournables, les personnalités exceptionnelles de cet artisanat dans le Midi toulousain?
- Quel était le champ d’activité de ces artisans (ville ou/et campagne)?
- Quelle était la répartition des tâches entre les artisans? S’associaient-ils ou se sous-traitaient-ils des travaux?
- Quelle était la part d’invention des artisans dans les œuvres qu’ils réalisaient?
- Quel était leur investissement, leur implication dans l’approvisionnement en plâtre sur les chantiers?

 
La conservation, le développement, la formation, la pérennité des savoirs faire
Jean Loup BOUVIER, ateliers Jean Loup BOUVIER

Il est ici abordé les savoir-faire nécessaires aux travaux de restauration concernant la gypserie, les différentes méthodes touchant la conservation, la consolidation, la restitution, et d’autre part, la formation vers ces métiers.
Qui sont les formateurs, que sont les ateliers, que sont les débouchés pour pérenniser ces métiers ?

 
Une matière, des hommes, leurs œuvres
Gisèle TAXIL, architecte dplg, ornemaniste,
chargée de recherche au CRA Terre, école d’architecture de Grenoble

L’association de valorisation du gypse et du plâtre dans les Alpes du Sud travaille à la pérennité et à la diffusion des savoir-faire liés au gypse et au plâtre. Ses frontières s’étendent là où la matière se trouve et les Alpes du Sud regorge de ses richesses.
Dans un premier temps, il est brièvement présenté ce patrimoine spécifique des Alpes du Sud ainsi que quelques unes des actions réalisées par l’association.
L’empreinte du gypse et du plâtre se lit dans nos paysages, auprès des murs de notre architecture rurale et industrielle, ainsi que dans les intérieurs des demeures bourgeoises et sur les façades des châteaux où l’art provençal appelé gypserie, nous révèle encore une autre facette du plâtre: celle de la richesse et de l’originalité des décors en architecture.
Les actions de l’Association (visites et conférences, restauration, inventaire, animation et formation...) ont pour vocation de prendre conscience de la valeur de notre patrimoine bâti et de transmettre une culture locale.
Une matière, des hommes, leurs œuvres :
Dans le cadre de ses actions d’inventaire, et afin de l’assister dans son travail de communication et de conseil, de valorisation et de formation, l’association élabore un outil supplémentaire: un documentaire. Ce travail comprend des images, des interviews et des séquences vidéo prises lors de visites sur les sites de travail des gipiers travaillant le plâtre dans l’architecture.
Ce documentaire permet de « rencontrer » des hommes à l’œuvre dans le contexte de leur travail sur site, et de découvrir la matière qu’ils travaillent, les outils qu’ils utilisent, les gestes que leur métier nécessitent et les œuvres qui naissent de leurs mains.
Ce documentaire aborde également quelques techniques (donc, non exhaustives) et savoir-faire pour la création ou la restauration d’enduits et de décors dans l’architecture tels que: le plâtre modelé comme matériau « intermédiaire » dans la création de décors, suivi des techniques du stuc pierre et de la mouluration massive, et enfin du modelage du plâtre à l’état plastique pour la création d’un décor rococo.

 
Origines, transformations et rôles des gypses dans la géologie bas-alpine
Myette GUIOMAR, Réserve Géologique de Haute Provence

Les gypses jouent un rôle important dans l’histoire géologique et géomorphologique de la Région PACA. Le territoire de la Réserve Géologique de Haute-Provence offre une vision d’ensemble sur les différents types de gisements; en effet il n’existe pas un type de gypse mais plusieurs, différents de par, leurs âges, leurs origines, leurs modes de mise en place.
Les gypses les plus célèbres, autrefois abondamment exploités pour la fabrication artisanale du plâtre, sont datés du Trias moyen et supérieur. La mise en place de ces roches évapontiques est liée à l’ouverture de l’océan téthysien qui va séparer en deux blocs l’unique continent constitué à la fin de l’ère primaire: la Pangée. La distension affecte le continent, des failles délimitent des zones d’effondrement qui vont être envahies par les eaux marines. Dans un contexte continental puis marin sous des latitudes tropicales, le paysage de nos régions est, il y a 240 à 210 millions d’années, celui de sebkhas et de lagunes sur-salées.
Les gypses se déposent en couches régulières au sein des séries évaporitiques qui comprennent en outre des dolomies, de l’anhydrite, de la halite, des argiles...
Ces gypses à la base des épaisses séries marines du Secondaire (calcaires et marnes) jouent un rôle majeur dans la tectonique régionale: ils constituent des couches «savon» au-dessus des quelles les séries vont se décoller, se plisser et évoluer en chevauchement. La base de toutes les nappes et écailles de la région dignoise est matérialisée par les couches de gypses triasiques.
Les gypses du fait de leur densité et de leur dureté plus faibles que celles des autres roches environnantes ont tendance à fluer et à migrer. Le fluage se produit soit lors de l’avancée des
nappes de charriage (compression) soit le long des failles normales (distension). Ce dernier cas est illustré par des remontées de gypses (diapirs) le long des accidents qui affectent les fonds sous-marins au Jurassique (diapir de St Geniez).
Moins spectaculaires sont les gypses du Tertiaire, essentiellement représentés par des dépôts oligocènes. lis se sont mis en place dans des fossés d’effondrement rappelant ceux du Trias. De tels affleurements de gypse bordent l’escarpement de la Faille d’Aix : gisements de Manosque et de St Geniez.
Alors qu’ils peuvent donner des masses importantes à l’Ouest de la Durance (région de Manosque, Vaucluse...), susceptibles d’être exploitées, les gypses oligocènes ne sont pas connus à l’Est de l’accident médio-durancien (faille d’Aix).
Un autre exemple beaucoup plus discret: les gypses du Miocène. Ils ne sont présents que sous forme de minces lits interrompant une sédimentation argileuse et lacustre, ou sous forme de petites roses des sables. Les bassins lacustres de la région de Castellane illustrent assez bien cet exemple. La genèse de ces gypses est liee a l’erosion de massifs de gypses triasiques affleurant dans le secteur vers moins 10 millions d’années.

 
Les propriétés particulières du plâtre surcuit en Allemagne et surtout en Franconie
Docteur Gùnter LUCAS, Allemagne

A) la grande diffusion géographique de la Chine et la Perse
• par le Sinaï, Salzburg, la Suisse, la Franconie, la Thuringe,
la Basse-Saxe, la Saxe, la Saxe-Anhalt, Berlin, Hambourg et Lùbeck à Paris, l’ile-de-France et le midi de l’Espagne;
B) les particularités après la cuisson
• en Allemagne, historique: 900 - 1000 0C, 20 - 80 heures, les différences des gypses divers sont largement égalisées, un peu fritté, un peu du CaO du CaSO4 et du CaCO3.
C) les particularités matérielles après le battage
• gros : le diamètre du grain maximum 5 mm environ.
D) les particularités matérielles après l’hydratation
• l’analogie apparente macro et microscopique des échantillons malgré des origines diverses, pas du sable nécessaire, pas de chaux Ca(OH)2 nécessaire, presque aucunes fissures de retrait et de gonflement, petit rapport eau de gâchage / plâtre à cause de frittage et du battage gros (0,25 - 0,35), grande densité apparente (1,6 - 1,75 g/cm3), petite porosité (25- 30 %), petite capillarité (0,11 -0,15cm . min-1/2), habitus des cristaux hydratés pas prismatique, mais compact, trapu et écailleux, relative grande résistance première, résistance finale (en état sec) comme du béton (30 N/mm2),
• grande tolérance et compatibilité à des pierres à bâtir (environ 13) et a du bois.
Même des grains de plâtre surcuit de 16 mm épaisseur ne provoquent pas des fissures de gonflement. C’est la plus grande particularité - peu étudiée scientifiquement.

 
Usages en architecture vernaculaire
Francine SIMONIN, DEA d’anthropologie

« Gipier » : terme pouvant désigner, en particulier en Provence jusqu’au XlX0siècle, aussi bien celui qui fabrique le plâtre que celui qui le met en œuvre en architecture. Au point que, sans contexte de référence, il est impossible de savoir quel métier pratique vraiment tel « gipier » rencontré par exemple dans un acte d’état civil.
• Paysans/fabricants : pratiques de fabrication du plâtre à partir du gypse local.
Processus techniques et socio-économiques mises en œuvre par les familles et/ou communautés paysannes dans cette fabrication (auto-consommée; parfois en partie vendue).
• Paysans auto - consommateurs : utilisations dans l’architecture vernaculaire
* Datation: essentiellement XIXe5, si connue ou probable (plus problématique qu’en usages relevant de l’Art, au
vocabulaire décoratif bien datable)
* Exemples de mise en oeuvre dans les infrastructures de fabrication du plâtre (04)
* Exemples de mise en oeuvre dans les bâtiments ruraux (04 et 12):
- moellons à bâtir en gypse
- liant: mortier de plâtre
enduits de plâtre : extérieurs; intérieurs (murs, sols, plafonds, hourdis, voûtes); sous-couches
et finitions : diverses qualités de plâtre utilisées
éléments d’architecture intérieure ou de décor en plâtre: cheminées, éviers, niches,
alcôves, boulins auto-consommateurs.. auto-constructeurs ? rôle des maçons/gipiers (difficile à mettre en évidence et à
nommer, par manque de traces écrites).
• Pourquoi cet usage vernaculaire ne semble pas avoir eu cours dans d’autres régions productrices de plâtre?
Exemple de la Saône-et-Loire - hypothèses sur les causes de ce « vide » usager.
Mise en parallèle avec une question concernant un autre non-usage restant à étudier: pourquoi les paysans hauts-alpinS ont-ils si peu utilisé le plâtre sur les prairies artificielles (légumineuses), tandis que leurs homologues d’autres régions (Rouergue, Bourgogne...) l’utilisaient en quantité au XIXe siècle ? (Cet usage a permis alors aux sud-aveyronnais d’améliorer leur race ovine, induisant une explosion productive du Roquefort).

   
  Entre gypse et gipiers
Philippe BER TONE, gipassier

Pour nous émouvoir, les gipiers, outre leur savoir-faire, ont dû acquérir la matière première nécessaire à l’exercice de leur art.
C’est le gipassier, parfois aussi agriculteur, qui, en amont de leur travail, fabriquait le plâtre utilisé aussi bien en ornementation que pour le bâti, qu’il soit citadin ou rural. Cette communication a pour objet de détailler les différentes étapes du processus de fabrication du plâtre « paysan »,artisanal et industriel, en Haute-Provence, au cours des derniers siècles, plus précisément sur les communes de Clamensane (04), d’Upaix (05) et de Lazer (05). Les différentes techniques d’extraction, de cuisson, de broyage et de conditionnement sont abordées à travers les nombreuses expérimentations de fabrication qui se sont appuyées sur des entretiens, des recherches en archives et des recherches bibliographiques. Sont aussi présentés les chantiers de restauration au cours des quels le plâtre «paysan » est utilisé, pigeonnier d’Upaix (05), chapelle et oratoire de Baudinard (04).

   
  L’art du gip une richesse du patrimoine rural bâti des Alpes du Sud
Frédéric CHARPENTIER, architecte dplg

Il est rassurant de constater que certains décors sculptés de grandes demeures sont connues et font l’objet de recherches. Mais il reste à identifier tout le patrimoine rural bâti en plâtre des Alpes du sud et à présenter des techniques d’entretien et de restauration.
Dans les hameaux où l’on trouvait du gypse (de nombreux sites d’extraction et de production ont été relevés), les paysans préparaient eux-mêmes leur plâtre qui allait servir à bâtir les bâtiments: planchers, enduits des murs intérieurs et extérieurs, cloisons, lits, cheminées, voûtes, décors moulurés etc.
Le gipier était avant tout le maçon-plâtrier, bâtisseur local. Les métiers du bâtiment représentaient une proportion importante des professions artisanales dans les communes. En fait rares sont les maisons rurales qui ne soient l’œuvre d’un spécialiste. De nombreux prix-faits des siècles passés montrent que même pour bâtir une habitation modeste on faisait appel au gipier.
Les maisons rurales, les bergeries, pigeonniers, moulins etc. contiennent des éléments de décor qui témoignent de savoirs faire devenus rares. Ils constituent aujourd’hui un patrimoine architectural riche et original en danger de destruction.

Si l’utilisation du plâtre est indispensable à la restauration du patrimoine vernaculaire, nous verrons que c’est aussi une solution technique de haute qualité en construction neuve. L’exemple se situe en Ile-de-France où le plâtre est encore largement diffusé. Je présenterai ici un projet mené par Patrick Petit, architecte, avec qui j’ai collaboré lors de la réalisation d’une maison individuelle où le plâtre a été mis en œuvre en enduit extérieur et intérieur. Les façades sont ornementées par des décors classiques. Ces gypseries ont été traînées sur place au gabarit ainsi que les chaînes d’angle simulant la pierre de taille. A l’intérieur des plâtres teintés dans la masse, lissés ou cirés, un escalier à voûte sarrasine, une cheminée en plâtre moulée, des corniches au plafond réalisées in-situ. Nous verrons ici une mise en œuvre à la fois traditionnelle et contemporaine. Ces techniques sont applicables dans les maisons anciennes quelle que soit la région. Cette réalisation sera davantage développée à l’aide de photographie.

Intuition ... pour la restauration d’une maison fin XVIe siècle à SERRES (Hautes Alpes)
Hélène RIBLET, Service Départemental de l’Architecture des Hautes Alpes. A.B.F.

Village de SERRES - Vallée du Buëch - Hautes-Alpes - 1975
En face de l’église, dans un parcellaire médiéval serré : une façade étroite, à une seule travée de fenêtres. La maison, dite de « Lesdiguières », présente un visage gris. L’architecture du rez-de-chaussée et du premier étage s’est banalisée.
Cependant, la porte d’entrée, la superposition de deux registres de décors aux étages, une croisée au profil travaillé, témoignent d’une présentation antérieure savante et raffinée.
A l’intérieur, la présence d’éléments de confort aménagés au fil du temps (cabinets de toilette), des papiers peints, plusieurs épaisseurs de peintures et badigeons blancs, chargent et encombrent le corridor et la cage d’escalier, autrefois éclairés d’un puits de lumière qui ne joue plus son rôle qu’aux derniers niveaux.
Rappelons que la maison, construite dans le versant de la Pignolette, en compte au total 4 au-dessus de la rue Peuzin, et 3 en contrebas.

Dans un premier temps, les intérieurs sont mis en propreté.
A l’extérieur, la façade fait l’objet d’une première intervention, en 1986, qui va rendre plus lisible l’ordonnancement de sa composition :
- les profils des éléments décoratifs : corniches, modillons, chapiteaux et bases de pilastres, sont repris. Les bandes, à motifs de rustication, sont en grande partie refaites.
- une fenêtre à meneaux est restituée au premier étage, sur le modèle de celle du second.
- une mise en teinte met en relief les registres décoratifs, qui apparaissent en blanc, sur fond ocre-rose.
En 1996, la possibilité d’acquérir la partie basse permettra aux propriétaires de redistribuer les fonctions utilitaires, et de dégager les espaces de circulation intérieurs. Ils envisagent alors une restauration importante de la maison :
- une consolidation en sous-œuvre de la façade rue Peuzin,
- un assainissement des caves,
- une réorganisation des pièces à vivre et des pièces d’eau,
- l’embellissement de l’escalier et la restitution du puits de lumière sur toute sa hauteur, en façade, la restitution de la porte charretière en rez-de-rue et une remise en teinte des niveaux supérieurs…

   
  Le feu et l’eau sur les gypseries du château de Lunéville.
G BARTHE Mireille BOUVET, conservateur général de l’inventaire et Pierre Yves
CAILLAULT, architecte en chef des Monuments Historiques

Situé à une trentaine de kilomètres de Nancy, le château de Lunéville se dresse à l’emplacement d’un ancien château fort, transformé une première fois en demeure ducale par Henri 11(1608-1624), l’édifice actuel, connu sous le nom de Château Stanislas date du premier quart du XVIIIe siècle. Il est dû essentiellement à l’architecte parisien Germain Boffrand que le duc Léopold fit venir en Lorraine à partir de 1709. Justement réputé comme le « Versailles lorrain », l’ensemble, à côté duquel se greffe un théâtre reconstruit au début du XXe siècle, présente une grande homogénéité architecturale et une qualité remarquable tant dans ses sculptures que dans ses décors intérieurs. Le château de Lunéville est le seul édifice ducal lorrain à avoir conservé l’essentiel du décor porté des ses appartements princiers. Si la disparition des peintures, des tentures, des tapisseries et des meubles en perturbe aujourd’hui la lecture, le faisant apparaître exagérément sobre et sévère, il n’en constitue pas moins l’ensemble le plus cohérent et le plus important identifié à ce jour en Lorraine, rassemblant sur un même site des lambris et des gypseries réalisés sous la direction de trois grands artistes de la première moitié du XVIIIe siècle: Germain Boffrand, François Dumont et Emmanuel Héré pour des espaces très variés, à fonction religieuse (la chapelle), d’apparat (chambre d’apparat, salle des trophées, escalier) mais aussi d’un usage plus intime (chambres et cabinets).
En nous contraignant à un examen précis des décors particulièrement bien documentés et en place dans leur contexte architectural, le récent incendie de janvier 2003 nous conduit à mener une analyse très fine de cet ensemble tout à fait remarquable par la qualité du modelé et de l’intérêt de la technique choisie par les artistes qui surent marier l’efficacité du moulage à la grâce du modelage.
Le sauvetage des décors en gypseries nous a également permit d’engager une réflexion sur les techniques mises en œuvre au XVllle siècle et d’observer le comportement de ces ouvrages face au feu et à l’eau.

   
  Apollon et le décor extérieur de l’hôtel d’Etancourt à Rouen
Fabienne DRUILHE, restauratrice du patrimoine

La restauration d’Apollon, statue en plâtre provenant de l’ensemble décoratif de la cour intérieure de l’hôtel d’Etancourt, est un exemple original et atypique de décor monumental privé réalisé en extérieur au début du XVlle siècle à Rouen.
Ce décor était constitué de 15 statues de dieux et d’allégories un peu plus grandes que nature (environ 2 m de haut), placées sur des socles à une hauteur de 5 m environ, contre des façades à pans de bois des XVle et XVI le siècles.
L’installation d’un supermarché dans l’hôtel au début des années 1930 entraîna l’inscription à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques des façades sur cour et des statues. Malgré cette mesure de protection, une lente dégradation commença, causée par l’absence d’entretien et les bombardements de 1944. Cette détérioration très forte des sculptures conduisit à leur dépose en 1963, suivie d’une restauration inaboutie, du moulage de sept des sculptures, disparues aujourd’hui, et de la mise à l’abri des quatre originaux subsistants dans les réserves du musée des Beaux-Arts de Rouen.
Les sculptures et les socles ont été réalisés en plâtre. Les analyses des prélèvements d’Apollon ont montré que ce plâtre était mélangé à de la colle animale et à de l’huile. Ces additifs étaient sans doute destinés à augmenter la résistance du plâtre à l’extérieur, la surface étant aussi protégée par des imprégnations ou des badigeons.
Les statues ont été obtenues par moulage et modelage: moulage de différents éléments de grande taille (jambes), modelage des cheveux, des drapés et d’éléments sur des clous plantés dans les murs.
Les sculptures avaient des armatures intérieures: des barres en fer dans les bras, les jambes, et elles étaient maintenues contre le mur à l’aide de tenons de fixation.
Aujourd’hui l’étude de ces quatre sculptures et la restauration d’Apollon devraient permettre de redonner un sens a ces œuvres et d’envisager leur présentation dans le musée.

   
  Restauration des décors en gypserie : l’Hôtel particulier d’Arlatan-Lauris Aix en Provence
Atelier MERINDOL

Dans le cadre de la réhabilitation d’un ensemble immobilier composé de deux hôtels particuliers à Aix en Provence, notre entreprise a été choisie pour restaurer les décors classés Monuments Historiques de l’hôtel d’Arlatan-Lauris. Ces travaux ont été supervisés par M. François BOTTON, Architecte en chef des Monuments Historiques et se sont étalés sur deux années.
Les décors de cet hôtel particulier représentent un ensemble complet exceptionnellement bien conservé. Les 10 salons et boudoirs comportent un décor distinct avec des thèmes variés représentant les travaux d’Hercule, les quatre saisons ou encore les quatre éléments. Leur réalisation a été effectuée durant les XVII et XVllle siècles.
Notre intervention s’est déroulée en deux étapes:
- Au début de la campagne des travaux de gros œuvre : prise de vue complète des décors, consolidation d’urgence et protection; dépose et protection des rosaces et des dessus-de-porte transportés à l’atelier pour restauration. Reconstitution des décors déposés en atelier.
- Pendant les travaux de second œuvre: repose des rosaces et dessus-de-porte restaurés, reconstitution des plafonds, nettoyage, avec diverses méthodes élaborées selon l’encrassement, la fragilité et les techniques des décors, consolidation, reconstitution des parties manquantes, réalisation de compléments, remise en teinte des décors de gypserie.

   
  Plâtre blanc et Paris Ville lumière
Pascal PA YEN-A PPENZELLER, expert stratigraphique du patrimoine

Renaissance du Plâtre de Paris, de la géologie à la pratique, du symbolisme au badigeon.
La richesse naturelle de Paris en gypse (anamnèse des différents sites de carrières) a permis aux romains de traiter le décor des monuments publics d’une manière à la fois somptueuse, et conforme à leurs coutumes stylistique et économique.
Par la suite le plâtre a servi à l’ensemble de la construction y compris des églises. Le blanc est associé à Paris et ce qui unit l’architecture dite gothique et ce matériau, est bien cette lumière de la Ville Lumière dont A. Malraux a fait la raison même du ravalement.
Par la suite la querelle du blanc au XVlle siècle a affecté cette couleur aux bâtiments aristocratiques, la couleur, la brique, étant associée aux constructions de service.
Au XVIIe siècle, les Carmes inventent le Blanc des Carmes, peinture sur plâtre, dont on étudiera la composition et qui assure à Paris en l’absence de carrière, un vêtement de marbre « impeccable ».
Le badigeon, dont au fond le Blanc des Carmes fait partie, apparaît également au XVlle siècle et a pour fonction d’éclairer la ville et ses vieux bâtiments.
Le Blanc de Plâtre a marqué Paris, la peinture l’a ensuite recouvert à tort et portant tort aux façades.
Il est aujourd’hui l’enjeu d’une redécouverte par les professionnels et les institutions en charge du Patrimoine.

   
  Le musée du plâtre à Cormeilles
Musée du plâtre: Vincent FARION
Naissance d’un proiet


En 1982, à la suite de menaces écologiques sur la carrière Lambert de Cormeilles-en-Parisis (Val-d’Oise), une poignée de Cormeillais emmenés par Françoise Tribondeau créaient l’Association des Amis de l’Ecomusée - Musée du Plâtre. Il s’agissait pour la nouvelle association de faire prendre conscience de l’exceptionnel patrimoine scientifique, industriel et historique constituée par la carrière Lambert, de convaincre habitants, élus et professionnels, de faire connaître et aimer le gypse et le plâtre.
recherche d’un lieu d’accueil
D’abord sans localisation, dès le départ en 1982, la recherche d’un lieu de mémoire fut une idée fixe. A la suite expositions itinérantes, de rencontres diverses, d’accumulation d’objets, photos et ouvrages, une première piste déclenche sans succès en 1991 une étude de faisabilité financée par la Ville de Cormeilles, le Conseil Général du Val-d’Oise et la DRAC Ile-de-France. Finalement en 1995, le musée s’installe dans une maison ancienne du 18e siècle, ancienne école maternelle de Cormeilles, mise à disposition par la Ville et qui vit grandir des générations d’enfants.
Sciences et techniques. du gypse au plâtre
Les sciences et techniques est un des plus importants thèmes suivis avec constance par notre association. Nous participons à la Fête de la Science depuis son début en 1992 organisée par le Ministère de la Recherche. Le musée a mis en place l’Atelier du Plâtre, initiation des enfants au moulage, que complète une vulgarisation scientifique auprès des visiteurs. Les visites de la carrière Lambert constituent le “produit d’appel” pour les passionnés et les premières visites furent parrainées par le professeur Pomerol, spécialiste de la géologie du Bassin Parisien et de la formation du gypse.
Histoire et Art du plâtre
Développer l’histoire du plâtre ou les “histoires” du plâtre dans nos salles d’expositions c’est d’abord montrer l’importance et l’universalité du plâtre dans le temps et l’espace. L’art du plâtre a toujours un traitement de faveur qui rejoint la longue saga du plâtre. C’est dans ce but que l’association est membre fondatrice du GRPA. L’amicale et talentueuse collaboration avec le grand photographe d’art baroque, Ferrante Ferranti en témoigne aussi. Les nombreux ouvrages acquis et collectionné constituent le fond de la bibliothèque ouverte en 2001. Des professionnels animent les différentes mises en application du plâtre au cours de démonstrations grand public et d’un atelier pour les enfants.
La mémoire de la carrière Lambert
L’Atelier de Mémoire, lancé en 1996, se veut un méticuleux et rigoureux travail sur la mémoire locale. Témoignages enregistrés, documents et photographies recueillis auprès des Anciens de la Carrière Lambert inscrivent encore plus le musée dans le terreau cormeillais. Tous les ans les Anciens se réunissent amicalement au Musée du Plâtre pour se retrouver et échanger leurs souvenirs. Grâce à ce travail cette mémoire s’exporte au-delà de Cormeilles.
Une utopie réalisée
Le cap a été maintenu, le Musée existe et l’ambition de l’équipe actuelle est toujours de maintenir vivante la mémoire de ceux qui ont contribué au développement de ce matériau. Le contact avec les autres associations et passionnés du plâtre a toujours été cultivé avec soin, aux quatre coins de France. Notre association voudrait maintenant établir les structures qui permettraient de mieux faire connaître le plâtre, au-delà des limites de Cormeilles-en-Parisis.
   
  Les plâtrières de Berzé la ville
Marie-Anne GAGNOL, association les amis du Vieux Berzé

En Bourgogne, et plus précisément en Saône-et-Loire, existaient, au XIXe siècle, de nombreuses exploitations. A Berzé-la-Ville, de gypse a été extrait pendant plusieurs siècles par des habitants isolés ou associés. Les moines de Cluny, qui y possédaient un doyenné, n’extrayaient que la partie supérieure des veines constituée par du gypse blanc et très pur. A partir du XVIIIe siècle, le développement de l’urbanisation nécessitant davantage de plâtre, on a exploité la totalité des gisements.
Les plâtrières de Berzé la ville
Situé dans le Val lamartinien, à mi-distance de Mâcon et de Cluny, Berzé-la-Ville possède une ancienne carrière de gypse. On trouve sur la commune des vestiges de fours et de moulins assez bien conservés.
A partir de 1856, le propriétaire des carrières se lance dans la production des champignons dans la partie supérieure des galeries et y fait germer de l’orge pour la fabrication de la bière. Il installera une malterie au rez-de-chaussée et dans les combles d’un grand bâtiment, encore visible, à côté de l’entrée haute de la carrière.
L’exploitation de la carrière de Berzé-la-Ville cessera en 1899 pour des raisons essentiellement économiques. Le matériel sera vendu ou dispersé, la couverture des fours et la cheminée seront détruites, les vestiges existants se dégraderont, victimes de l’oubli.
On trouve dans la région, plus ou moins bien conservés, de nombreux décors en gypse et en plâtre.

   
  Un vestige méconnu de l’exposition universelle de 1900:
Le restaurant Pavillon Elysée et son décor plafonnant
Laurent NOET, docteur en histoire de l’art

Le restaurant de l’Elysée-Lenôtre, autrefois pavillon Paillard, fut édifié par l’architecte Albert Ballu (1849-1939) sur les Champs-Elysées, face aux Petit et Grand Palais, afin d’accueillir à sa table une clientèle aisée venue visiter l’Exposition universelle de 1900. Pour le décor de la salle à manger, consistant en un élégant plafond peint inscrit dans un écrin de staff, Ballu fit appel à l’un de ses collaborateurs privilégiés Jean-Baptiste Hugues (1849-1930), grand prix de Rome de sculpture en 1875.
Les deux hommes avaient déjà décoré ensemble une brasserie parisienne, le Café Riche (bas-relief en céramique polychrome pour la devanture, “la Danseuse de café-concert”). Le statuaire, qui ici se confrontait pour la première fois à un décor plafonnant, s’associa les services d’un sculpteur omemaniste du nom de Poulain. Cependant, il était par ailleurs fortement sollicité pour d’autres travaux liés à l’exposition (statue pour la gare d’Orsay, frise de dix bas-reliefs pour le Petit Palais). Aussi réadapta-t-il des motifs conçus pour la façade du palais voisin, créant ainsi entre les deux bâtiments des liens plus étroits qu’un simple voisinage. Une figure, intitulée “le Vin”, fut notamment reprise telle quelle, la pose ayant été simplement inversée par rapport au sujet original ; d’autres éléments semblent provenir de la même source. De fait, au-delà du gain de temps et d’argent qu’implique le remploi de formes préexistantes, le procédé montre la grande liberté du sculpteur et la confiance de l’architecte.
Ma communication s’attacherait donc à retracer l’historique du bâtiment et de son décor, à retrouver les sources exactes de l’iconographie et, enfin, à établir les liens existant entre l’architecte et son décorateur et, si possible, le commanditaire.

   
  Hasard du processus de modelage, formes hasardeuses
Jans HOOS, stucateur (Stuttgart) Allemagne

Par cette intervention je voudrais avancer que les éléments essentiels dans l’ornement rococo trouvent une part de leur origine dans la « trace hasardeuse », héritage de l’outil dirigé par la main qui modèle dans ou sur le matériau.
Cela pourrait mener à la réflexion du phénomène de hasard, qui touche également d’autres travaux que j’ai exécutés. Ici il sera seulement fait allusion au fait que le hasard n’existe que dans le sens d’une perception limitée de l’homme.
Probablement, chaque hasard qui se produit pourrait être un arrêt du destin, ou un événement dans un Grand plan.
Ou bien, est-ce que tout est seulement mouvement sans sens? Et l’on chercherait alors en vain l’âme dans l’Art?
En parlant du travail de l’ornement, il faut réduire le « hasard complet » en « hasard calculé ». Comme au jeu de dés, il y a une quantité limitée de possibilités dans un espace limité. Cependant on ne sait pas, quand cela surviendra, et dans quelle manière il influencera le développement futur.
Quant au modelage d’un ornement il est intéressant de remarquer, que dès la pose du mortier, le dessin préparatif disparaît. Cela donne à la forme la possibilité de s’émanciper.
La naissance de la forme née du hasard du mouvement… Comme la vie prend forme part les hasards du destin …